dimanche 14 février 2016

Atelier d’écriture chez Bric à Book (209è)




une photo quelques mots atelier d'écriture en ligne

Pour découvrir le texte de tous les participants :
 http://www.bricabook.fr/

Cette semaine, l’atelier de Bric à Book prend une autre dimension et sort du cercle du net. Comme l’an dernier, Framboise propose de collaborer avec elle à un projet fou fou fou, mais tellement porteur. L’idée est de proposer une photo ET un thème pré-défini : le harcèlement de rue. Mais cela ira même beaucoup plus loin …
Laisse-lui la parole :
"Comme l’année précédente, nous organisons sur l’Université de Toulon, une manifestation autour de la question du sexisme et du harcèlement de rue. Vos textes feront l’objet d’une exposition durant toute la semaine. Et, pour illustrer notre débat (qui clôturera une semaine d'événements culturels) vos textes seront lus sur scène par des étudiants de l’atelier théâtre.
Deux contraintes pour cet atelier : écrire à partir d’une photo et d’une thématique : le harcèlement de rue.
En vous remerciant infiniment de votre participation…."
Voici la photo :

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Mon texte :

C'est pas que le Commissaire ne la croyait pas, mais il avait eu un doute. Il y a tant de jolies filles qui viennent se plaindre d'être "harcelées par des mecs" alors qu'elles pourraient juste dire "draguées" (on le dit encore, de nos jours ?), "courtisées" (ce mot n'est plus du tout à la mode), "racolées" (ça fait prostitution, non ?). 
Au lieu de ça, elles insistent : on les importune sans raison, on les tourmente pour un rien, on les agresse vraiment.
- Ça se passe comment ? demande le Commissaire.
Celle-ci semble réellement terrorisée, sincère. Elle n'a pas une allure provocatrice par l'habillement ou le maquillage. Elle est jolie mais de façon naturelle, simple, presque sans attraits. Elle est en robe (pour les besoins de son travail, précise-t-elle) et légèrement fardée.
- Ils m'interpellent, explique-t-elle. Ils sifflent, ils lancent des compliments un peu grossiers, puis ils s'approchent, m'entourent, ils sont trois, c'est beaucoup.
- Vous touchent-t-ils ?
- Oui, rapidement, l'un m’attrape par le bras, puis un autre essaye de m'enlacer par l'épaule...
Elle fond en larmes.
Le Commissaire saisit la boîte de mouchoirs et l'avance vers elle.
- Ne vous en faites pas, lui dit-il d'un ton radouci, nous avons des tas d'enregistrements vidéo car il y a une caméra à cet endroit. Vous n'êtes pas la première à venir vous plaindre.
- Une caméra ? Vous voyez tout et vous n'intervenez pas ? s'écrie la demoiselle qui est soudain en colère.
- Il faudrait les prendre en flagrant-délit, explique-t-il. Ils insultent leurs victimes, c'est tout. Il n'y a jamais de suite. Vous vous dégagez et poursuivez votre chemin, la plupart du temps, ils n'insistent pas. Ils tentent leur chance sur une autre qui ne saura pas se défendre. Ça les amuse de vous effrayer, ça les excite de vous insulter. Ils savent qu'on a l’œil sur eux.
- Ils savent, vous savez, et ça continue ! constata-t-elle avec amertume. Ça se résume à ça ?
- On ne peut rien faire contre eux, dit le Commissaire avec un petit sourire désabusé. Vous n'avez qu'à changer de trajet !

20 commentaires:

  1. J'avoue que cette photo ne m'a pas trop inspirée, mais tu t'en ai plutôt bien sortie. Cette histoire est assez fréquente dans la vie de tous les jours, et c'est vrai que les policiers ne font pas grand-chose... Bon dimanche.

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    1. Je dois dire que je ne m'étais jamais soucié de ce genre de choses... Bonne nuit, bisous

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  2. Terrible situation, mais c'est un peu ça effectivement ... tant que ça ne dérape pas, pourquoi intervenir ou sévir ? :(

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    1. C'est pénible d'entendre ces réflexions plus ou moins "correctes" mais comme tu dis, tant que ça ne va pas plus loin... tout est question d'éducation.

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  3. Les policiers et la société toute entière commencent lentement à "comprendre" ce que peut vivre une femme violée, et comment l'accueillir; on avance un petit peu, en ce qui concerne les violences conjugales physiques faites aux femmes, un tout, tout, tout petit peu sur les violences verbales (n'oubliant pas les hommes, qui en sont victimes, aussi, le harcèlement de rue, mazette!
    Pour tout cela, il faut secouer 2000ans de préjugés, idées reçues, inégalités acquises...
    Merci d'avoir écrit sur ce qui se passe "de l'autre côté".

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    1. Ce sont des sujets qui sortent peu à peu du tabou, il faut en parler. Ma fille a 16 ans et nous lui avons parlé de ces problèmes... à ses frères aussi d'ailleurs. J'ai toujours insisté sur le respect à l'autre, c'est la base.

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  4. Voilà ce qui fonde toute ma révolte: elles sont surement aguicheuses, elles ne voient pas que c'est juste de la drague, après tout ce ne sont que des insultes, on ne peut rien faire.... Changer de trajet... c'est tellement intolérable! Tu mets vraiment le doigt sur le fond du problème et je t'en remercie.

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    1. Merci Sabine. Il faut parler de ces agissements et prévenir nos enfants. J'ai fait exprès de faire dire à cette autorité ce que nous, nous n'avons plus envie d'entendre.

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  5. Benedicte D.15 février, 2016

    Et si on les attaquait par le porte-monnaie?....Tout individu repéré en activité de harcèlement se verrait infliger une amende dissuasive à payer sur le champ....Après tout il a des caméras ce Commissaire...C'est déprimant ce type de réponses apportées à quelqu'une qui a le courage d'aller se plaindre....Point de vue interessant.

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    1. Oui c'est déprimant, mais faut continuer d'en parler, de chercher des solutions, et pas celles préconisées par mon personnage !

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  6. Je crois qu'il y un énorme travail d'éducation à faire pour que les filles n'aient pas à changer de trajet.

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    1. Tout à fait ! A la base, il y a l'éducation. Les devoirs à respecter comme dans toute société.

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  7. Merci pour ce très beau texte.
    Ces préjugés et ces mots qui demeurent encore aujourd'hui : "de la drague" pour les femmes, qui n'ont qu'à s'habiller autrement, se tenir autrement ou "changer de trottoir"....

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    1. On entend ça encore trop souvent, et aussi de la bouche de femmes !!!
      Merci Framboise.

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  8. La mixité dans la police, voire une parité devrait peu à peu permettre une écoute moins machiste de ce genre de problème douloureux.

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    1. Certes, mais des femmes ont les mêmes préjugés ; il y a la parité dans les préjugés hélas...

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  9. Pathétique la réaction du commissaire (ces réflexions internes, son constat d'impuissance), il signe carrément une autorisation d'agression pour ce type d'individu...

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    1. Oui c'est un peu ça. Les gens ne se rendent pas compte parfois de la portée de leurs paroles, surtout quand ce sont des personnes qui ont une certaine autorité !

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